Pendant que la France continue ses rassemblements qui approchent rapidement un million de personnes dans les rues (si ils n’ont pas déjà atteint ce chiffre) — et avec d’autres grands rassemblements planifiés encore pour demain — ici au Canada, je dois avouer que j’étais moi-même légèrement interloquée par la réaction de simples Canadiens qui se donnent beaucoup de mal pour exprimer leur propre colère envers les actes abominables cette semaine en France.
Aujourd’hui j’ai fait passage à Fort-Érie dans le sud de l’Ontario, juste en face de la ville de Buffalo, New York (cette ville se situe un à deux kilomètres du centre-ville de Buffalo, du côté canadien de la rivière qui sépare les deux pays).
Ce qui m’a surpris, c’est que même des petites villes très anglophones du Canada, qui sur la surface n’ont pas de liens historiques ostentatoires avec la France (comme cette petite ville très « à l’anglaise » de Fort-Érie) ont mis leurs drapeaux en berne. Cela m’a incité d’appeler des amis dans les provinces de l’ouest du pays pour voir si c’était la même situation là-bas. Et bien oui, il se passe partout au Canada.
Parmi tous les autres pays des Amériques, il me semble que le Canada est unique dans ce sens (j’ai rapidement fait le tour des journaux et la télévision des É-U et d’Amérique Latine, et je n’y ai rien vu de l’ordre de ce qui se passe au Canada).
Photo que j’ai pris aujourd’hui de l’Hôtel de ville de Fort-Érie, dans le sud de l’Ontario, et leur drapeau en berne, comme ailleurs au pays
Honnêtement, hormis quelques exceptions telles le 9/11 aux États-Unis, c’est une des rares fois dans toute ma vie que je vois une chose pareille au Canada – le fait de s’exprimer à l’échelle nationale, au niveau individuel et comme société, notre sympathie collective – envers une autre nation. De St-Jean (Terre-Neuve) jusqu’à Victoria (Colombie-Britannique), les gens de partout au Canada trouvent leurs propres moyens pour exprimer leur solidarité avec la France !
C’est une expression de nos valeurs au Canada, dans toutes les provinces du pays – y compris le Québec – comme Francophones et Anglophones, unis ensemble.
J’espère bien que les médias du pays pour une fois se réuniraient, pour franchir la ligne linguistique afin de refléter, d’une seule voix, ces valeurs communes que nous sommes en train de s’exprimer d’un bout à l’autre du pays. Jusqu’à présent, les médias au Québec ne mentionnent que les manifestations qui s’organisent à Montréal et à Québec, et ne prononcent pas un seul mot sur ce qui se passe ailleurs au pays. Du même coup, les médias anglophones ne mentionnent eux non plus ce qui est en train de se manifester au pays, sauf dans un contexte très local (Et à Ottawa/Gatineau, les médias locaux demeurent un peu schizophrene comme toujours – mais peu importe, car les gens d’Ottawa/Gatineau au moins se revoient au travail et à la maison).
C’est triste… les gens ordinaires cherchent les moyens de s’exprimer d’un océan à l’autre, et ils se trouvent bloqués par les Deux solitudes “médiatiques” cette fois – une barrière complètement “artificielle” qui ne reflète pas la réalité de la situation.
Dans un sens, n’est-ce pas une nouvelle gifle face à ce qui est déjà un évènement très tragique? Nos voix méritent d’être entendues.
Les Anglophones et Francophones du Canada méritent de voir, dans les médias qui leurs appartient, qu’ils partagent ces mêmes valeurs.
Dans ce temps de crise, la France mérite de savoir qu’il y a un pays de ce côté de l’Atlantique qui la soutient à 100%, unis, ensemble. C’est le moindre qu’on puisse faire.
ADDENDUM 11-01-2014: Le jour après que j’ai publié ce billet, RDI a fait un reportage au sujet des manifestations de solidarité à travers le Canada… tant qu’au Canada anglophone qu’au Canada francophone (avec même un reportage en direct du milieu d’une foule rassemblée devant l’hôtel de ville à Toronto et un autre en directe d’Ottawa). C’est Peut-être une couverture tardive lorsqu’on pense à ce qui s’est passé au Canada ces dernier jours – mais mieux tard que jamais! Bonne job RDI! 🙂