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L’Importance du programme d’immersion française au Canada anglophone – pour le Québec (#166)

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Un message assez fort, assez poignant, et assez politique (pour ceux qui prétendent que le Canada anglais n’a pas changé depuis 1995).

This post is the French version of the last one:  The significance of Canada’s French Immersion Program – for Québec (#165) – PART 3 of 4.  It’s on a subject I feel strongly about, which is why I’m writing it in French as well.

Ce billet découle d’un billet précédent en anglais, French Immersion across Canada – Some maps.

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Un bon nombre de personnes qui suivent ce blogue se trouvent aux États-Unis.   Une de ces lecteurs des É-U m’avait envoyé une fiche avec des statistiques sur la situation d’éducation d’immersion aux États-Unis.

Les statistiques démontrent que les écoles d’immersion aux É-U offrent une formation en 22 langues, parmi lesquelles les trois premières sont

  • 45% l’espagnol
  • 22% le français
  • 13% le chinois

J’ai particulièrement trouvé les statistiques sur le français très intéressantes.

Alors, comparons le programme d’éducation d’immersion aux É-U et au Canada :

J’admets que je ne suis pas expert dans le domaine de l’éducation (pourtant mes études de premier cycle ont débuté en pédagogie).  Mais, il existe quand même une différence assez importante entre les systèmes des deux pays.

Qu’est-ce que c’est l’immersion française?

D’abord, pour ceux qui ne connaissent pas l’éducation d’immersion, c’est un programme conçu pour les locuteurs non natifs d’une langue quelconque, afin qu’ils puissent devenir courants dans cette langue.  On leur offre une éducation dans le cadre de cette langue non native (de la prématernelle ou maternelle jusqu’à la fin de l’école secondaire – ou au moins une grande partie de cette période entièrement dans la langue non maternelle).

Les écoles d’immersion ne sont pas des écoles francophones (les écoles francophones se trouvent elles aussi partout au Canada, mais elles sont désignées pour les enfants issus d’au moins un parent francophone, ou des enfants qui antérieurement fréquentaient déjà des écoles francophones ailleurs.   Ce droit de fréquenter des écoles francophones est consacré dans la constitution canadienne, et ces enfants s’appellent informellement « les ayants droit »).

Dans les écoles d’immersion (conçues pour les Anglophones du pays), la langue d’enseignement (c’est-à-dire la langue dans laquelle les cours sont donnés) serait la langue non native – une langue autre que la langue maternelle.  Cela vaut également pour les manuels scolaires (en mathématiques, sciences, sciences sociales et humaines, etc.).  Au Canada, la plupart des programmes d’immersion pour les Anglophones sont 100% en français à l’année longue, depuis la maternelle jusqu’à l’âge de 18 ans.

Mais il pourrait y avoir des variations.   Il existe certaines options pour des étudiants Anglophones, qui étaient auparavant dans le système anglophone ordinaire, de se faire transférer dans le programme d’immersion française plus tard (dans la sixième année, par exemple).  D’autres variations pourraient exister de temps en temps, tels les programmes « moitié-moitié », ce qui veut dire que la moitié des cours sont donnés en français, tandis que l’autre moitié est en anglais.  Dans certaines régions, il existe l’option d’une approche dite « comprimée », où on se voit donner la moitié des cours au début de l’année scolaire en français, et l’autre moitié à la fin de l’année en anglais (ce qui permet de réaliser des gains d’efficacité dans les écoles qui accueillent les systèmes anglophones et d’immersion sous le même toit).

Toutefois, le résultat est le même – avec le but de s’assurer que les étudiants anglophones grandissent et sortent du programme complètement bilingues, et ce avec un fort esprit de dualisme culturel anglophone/francophone.

Je peux citer mon cas à moi : J’ai grandi dans les régions rurales de la Colombie-Britannique et particulièrement de l’Alberta, et j’en suis un bon exemple de quelqu’un qui était dans le programme pendant plusieurs années.  Ma belle-sœur est elle aussi un exemple : elle a grandi dans le coin d’Ottawa, où elle a fait ses études dans le programme d’immersion (du début jusqu’à la fin).  Certains de mes cousins et quelques-uns de leurs enfants étaient, ou sont eux-aussi dans le programme d’immersion dans quelques villes différentes en Saskatchewan.  Mes neveux sont sur le point d’entrer dans le programme dans le coin d’Edmonton en Alberta.  J’ai connu beaucoup d’autres anglophones, partout au Canada qui incarnent aujourd’hui les résultats du programme, et j’en rencontre de plus en plus (peut-être pas à chaque jour, mais hébdomairement, certainement oui).

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Qu’est-ce qui distingue le programme au Canada de celui aux É-U?

Au Canada, tout comme aux É-U, parfois on pourrait y avoir accès à d’autres programmes d’immersion alternatifs (il existe des programmes chinois, ukrainiens, allemands, espagnols et islandais dans quelques villes dans l’ouest canadien, ainsi que d’autres langues en Ontario).  Mais c’est l’immersion française au Canada qui dépasse de loin toute autre langue d’immersion (franchement parlant, il n’y a même pas de comparaison à faire à cet égard).

Dans le billet d’hier, j’ai mentionné que j’ai appris que dans seulement 4 sur 10 des provinces (sans compter le Québec) il existe  980 programmes individuels d’immersion française.  Selon la tendance de ces chiffres, je me risquerais à dire qu’il pourrait exister autour de 1500 programmes d’immersion française, partout au Canada, d’un océan à l’autre, pour les anglophones hors Québec.

Quand on compare ces chiffres canadiens aux chiffres des 500 programmes aux É-U (grosso modo), il vous offre un aperçu à quel point le « système » d’immersion française est important au Canada.   (Pour égaler la « proportion » canadienne, les É-U devrait générer 15,000 programmes d’immersion, mais elles n’en comptent que 500 à l’heure actuelle.  Cela pourrait vous donner une idée de la largesse du programme au Canada).

J’irais même jusqu’à dire que notre programme d’immersion française est probablement le plus grande programme d’immersion au monde.  Une fois qu’un tel programme atteigne ce point, je pense pouvoir dire sans me tromper qu’il s’agit d’une véritable « institution nationale ».

Une des différences majeures qui existe entre les programmes d’immersion au Canada et aux É-U (ainsi que dans d’autres pays comme l’Australie, le R-U, l’Allemagne, ou l’Inde) réside dans la nature, le but, les résultats escomptés, et les résultats souhaités du programme canadien.

Il ne sert à rien de me tourner précautionneusement autour des aspects controversés, car à mon avis il n’y a pas de controverse.  Alors, parlons de l’éléphant dans la pièce.  Dans le premier cas, le programme au Canada trouve ses racines dans un sens de devoir civique — et alors, pourrait être considéré éminemment politique – tout autant qu’avec les autres atouts, tels l’accroissement de l’employabilité, la mobilité et l’ouverture sur le monde pour ceux qui y sont inscrits (dont seuls ces derniers trois points sont les préoccupations principales du programme aux E-U, avec parfois le raccrochage avec l’héritage familial).

Pourquoi en est-il ainsi au Canada?

Le Canada, y compris le Québec, devait faire face à la dure réalité des années 1960 et 1970.  Les iniquités linguistiques ont heurté le pays comme une tonne de briques.  Le Canada Anglophone commença à se rendre compte que le français était autant une langue « indigène » petit “i” du Canada (faute d’une meilleure expression) que l’anglais, avec le respect que cela implique.  Le Canada se rendait compte que le français n’était ni une « langue folklorique », ni une langue réduit au pied d’égalité avec les langues d’immigrants (le français est, et sera toujours aussi canadien que l’anglais).  D’ailleurs, à cette époque-là, le monde changeait autant à l’intérieur des frontières canadiennes qu’à l’extérieur, et il n’était plus acceptable d’assujettir un groupe fondateur à la volonté d’un autre.

Constatant qu’il fallait faire quelque chose, des Anglophones, des parents inquiets (soucieux et préoccupés par ces questions), les commissions scolaires, les gouvernements provinciaux, et le gouvernement fédéral ont entrepris un exploit extraordinaire de coopération afin d’essayer de régler la situation.  Ils ont mis en place les premiers programmes d’immersion (dont je faisais partie moi-même à titre de cobaye à l’âge de trois ans en prématernelle , durant la toute première vague d’immersion dans l’ouest canadien rural).   Peu après, le pays était aux prises avec le premier référendum de 1980, suivi par le rapatriement de la constitution, les rondes constitutionnelles de Meech et Charlottetown, et ensuite le deuxième référendum de 1995.  Ce fut tout un choc au pays pour le moins dire, et la situation — ce qui veut dire “le pays” — devait changer.

Sans vouloir paraître trop négatif (au contraire, j’en suis très optimiste et positif quant à ce sujet), je pourrais vous présenter toute une liste de politiciens au Québec, surtout souverainistes, ainsi que d’autres éminentes personnalités qui ont largement dénoncé et passionnément décrié le Canada anglophone pour avoir assisté le rallye monstre pré-référendaire de 1995 à Montréal.  Des dizaines de milliers de canadiens et canadiennes anglophones venant de tous les quatre coins du Canada ont afflués de toutes parts dans la Place du Canada à Montréal.  À ce moment-là, j’étais moi-même étudiant à l’université francophone à Edmonton.  J’essayais d’arrache-pied, avec un grand groupe d’amis, de se procurer de billets d’avion à Edmonton pour se rendre à Montréal, mais il n’y en avait plus de disponible.

Au Québec, il y avait de grandes critiques formulées à l’égard des Anglophones qui y sont allés (en rétrospective, moi aussi je partage certaines critiques à l’égard de ceux qui l’y ont assisté, et je comprends les points de vue des deux côtés de la médaille).   Sans parler de l’aspect “financier” de l’évènement, la plupart des critiques initiales se sont centrées sur l’apparence que ces Anglophones se sont donnés en spectacle, en essayant de convaincre toute personne qu’ils traversaient dans la rue de voter “non” – mais le tout en anglais.  Les critiques ont prétendu que c’était de la pure hypocrisie, prétendant que ces interactions dans la rue devaient avoir lieu en français.  Selon les critiques, ils maintiennent que si le « love-in » de proportions gigantesques était bel et bien sincère, les choses auraient dû changer depuis 1995.

Bon.  Mes amis, les choses ont changé.  Pourtant ces changements ne font pas la une dans les médias du Québec.  Il y a quelques années, une grande partie de mes amis et d’autres que je connais au Québec (y compris certains de mes collègues québécois au fil des ans) n’étaient même pas au courant de l’existence du programme d’immersion française hors Québec – à tout le moins jusqu’à ce qu’ils m’ont rencontré.  Mais c’est une situation qui change, malgré le silence médiatique à ce sujet.  Lorsque les souverainistes pures et dures essaient d’expliquer leur proposition sur la souveraineté à la population (car ils prétendent que la population « n’a pas compris » jusqu’à présent), ils sortent souvent l’argument que rien n’a changé au Canada Anglophone depuis 1995 – une période de 20 ans.

Cependant, à la façon dont je vois les choses actuellement, le “love-in” géant de Montréal n’était que le début d’un mouvement plus large d’individus ordinaires qui prenaient les choses en main… et qui continue de prendre de l’ampleur jusqu’à nos jours (car ses mêmes gens savaient qu’aucun gouvernement, n’importe où au monde, ne peut de par sa nature livrer des résultats instants… que ce soit un gouvernement dans un Canada uni, ou que ce soit un gouvernement dans un Québec souverain – Là, je pense qu’on peut s’entendre là-dessus).

Depuis le « love-in » de ’95, l’inscription dans les programmes d’immersion française à l’extérieur du Québec s’est envolée.  On ressort des chiffres astronomiques.  Je crois bien que le programme est devenu le plus grand programme du genre au monde, et même aujourd’hui, le programme continue de repousser les limites de ce qu’on aurait pu rêver en 1995.  Les raisons pour cet envol sont justement parce que les gens ordinaires à travers le Canada ont à cœur le Québec et l’avenir du pays, et ils veulent prendre en main des mesures eux-mêmes.

Il y a deux billets intitulé Learning French – don’t be afraid to take things to the next level, j’ai attiré votre attention aux chiffres presque incroyables du nombre d’étudiants à travers tout le Canada (hors Québec) qui sont inscrits dans ce qui constitue ce relativement nouveau programme d’immersion (il faut se rappeler que la plus grande partie de l’histoire du programme ne s’est déroulée qu’au cours des dernières 20 à 30 années).

À l’heure actuelle, il y a à peu près 320,000 étudiants inscrits dans le programme.  À tous les deux ans, ce chiffre grimpe encore de l’ordre de 10,000 à 20,000.   Depuis le début du programme, il est possible qu’un million (oui! 1,000,000) d’Anglophones l’y avait été inscrit à un moment ou à un autre – la grande majorité étant inscrite depuis 1995.

J’ai également fait mention que derrière chaque élève, il existe deux parents debouts, qui ont explicitement placé leur enfant dans le programme (alors, on est rendu à quoi?… 3 millions d’Anglophones qui soutiennent le mouvement pour assurer son succès? – sans compter tous ceux dans l’énorme bureaucratie reliée dans les 10 provinces, 3 territoires, ainsi que le gouvernement fédéral).

J’ai également fait référence aux listes d’attente qui existent pour s’inscrire dans le programme, ainsi qu’une pénurie de professeurs en raison d’une si forte demande (j’avais même des professeurs qui sont venus de la France en raison d’une pénurie de profs… et quand je vivais au Manitoba pour un bout de temps temporaire à l’age de 20 ans, j’avais trois colocataires venus du Québec qui se sont trouvés des postes à titre de professeurs dans le programme d’immersion en dedans de seulement une ou deux semaines en raison de la forte demande).  Et ces chiffres ne tiennent même pas compte de l’expansion et du potentiel du programme à l’avenir.

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Les villes qui comptent des programmes d’immersion en Colombie-Britannique, en Alberta, au Manitoba, dans le sud de l’Ontario et à l’Ile-du-Prince-Edouard — et ce sans compter les multiples écoles d’immersion à l’intérieur même de beaucoup de ces même villes.

Vous auriez du mal à trouver une ville de 7,000 et 10,000 habitants, n’importe où au Canada anglophone, qui ne compte pas au moins un programme d’immersion.  Il y a quelques jours à peine, j’ai entendu dire qu’une autre école Anglophone dans la ville où j’ai grandi en grande partie (Végreville en Alberta, population 5,800), songe y introduire un nouveau programme d’immersion – une tendance qui se répète à travers le pays.  Ici à Toronto même, tout comme à Vancouver, le programme continue de faire la une, de manière régulière, en raison du fait que les gens se battent pour inscrire leurs enfants.

Comme j’ai déjà dit, parfois j’entends des souverainistes pures et dures dirent que le Canada n’a pas tenu sa promesse de changer depuis le referendum de 1995.  Mais bon, vu ce que je viens de décrire, je crois que cet argument n’est plus valide, car il devient difficile de contrarier ces chiffres.

Les chiffres qui sortent du programme d’immersion française ont rapport directe avec des gens ordinaires qui s’impliquent directement pour réaligner des iniquités linguistiques et culturelles sur plusieurs fronts.  Contrairement à l’époque de 1995, ces gens-là qui sont issus du programme d’immersion méritent d’être entendus.  Leurs actions montrent qu’ils ont le Québec à cœur.

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Quelques commentaires “accrus”

À ce sujet, je vous offre quelques commentaires supplémentaires, mais hautement sensibles (alors je les mets à l’écart du reste du text (dans quelques paragraphes indentés):

Ce que je redoute, c’est que les médias au Québec, dans l’ensemble, continuent de contourner ou détourner à la marge tout ce qui se passe quant aux programmes d’immersion au Canada anglophone.  C’est comme ils sont en plein déni et ils refusent de reconnaître l’importance du programme, non seulement pour le Québec, mais pour la dualité culturelle et linguistique du Canada dans son ensemble.  On pourrait même penser que la question des programmes d’immersion française serait le scoop national du siècle.  

Ce qui se passe maintenant au Canada anglais n’aurait même pas pu faire partie des rêves les plus fous des plus pures et dures des nationalistes au début du movement nationaliste québécois, autour de 1960, ou même dans les années 70 et 80, jusqu’en 1995.

Mais, hélas, il n’y a pas de manchette au Québec.  Et personne n’y semble manifester le moindre intérêt.  Pourquoi est-il ainsi?  Pourquoi ne voit-on pas de telles manchettes?  Pourquoi personne n’en parle au Québec?

D’abord… regardons c’est qui le patron de Québecor (le plus grand diffuseur médiatique au Québec, dont l’accent est mis seulement sur ce qui se passe à l’intérieur des frontières du Québec — de manière intentionnelle je soupçonne, car c’est PKP qui avait le droit de décider quel serait l’objectif de sa propre société lors de sa création).

Et regardons comment beaucoup de journalistes ailleurs, aux “autres” réseaux et sur les autres plateformes médiatiques ne semblent pas vouloir reprendre et développer cette nouvelle — un scoop énorme pour ainsi dire — dont la manchette pourrait se lire:  “C’est incroyable !  Des millions de gens ordinaires, partout au Canada anglais, indépendants de tout parti ou toute allégeance politique, sont en train de finalement faire ce que nous leur avons demandé depuis 400 ans!  C’est un movement énorme, et c’est une réussite! – Merci du fond du cœur !  Il ne peut mener qu’à de bonnes choses !”.

Alors, puisque c’est l’omerta total chez les médias au Québec, on en vient à se demander s’il existe d’autres motivations qui incitent d’importants segments des médias francophones à ne pas vouloir raconter cette histoire à la population.

Je ne veux absolument pas laisser entendre que je fais du Québec-bashing… au contraire.  N’oublions jamais que dans un sens, je me considère aussi francophone que vous qui lisez ce billet.  Le Québec, ses gens, ses préoccupations et ses intérêts me sont toujours à l’esprit – autrement, vue mes origines de l’Alberta rural, je ne serais même pas en mesure de vous écrire ce billet.

Mais, lorsqu’on parle des médias et de leurs choix, celle-ci est une des questions politiques les plus sensibles au Québec… un sujet particulièrement délicat.  Alors, quant à la question des nouvelles que choissisent les médias à diffuser à la population au Québec, j’arrête drette-là de parler du “pourquoi” et du “comment”.  C’est un carrefour difficile et hautement chargé.  Je suis désolé, mais c’est juste trop sensible pour en parler davantage dans ce billet (je laisse cela pour un autre jour, et j’en parlerai, peu à peu, au cours de mes billets à l’avenir).

Cependant, je dirai ceci: Mes amis, bienvenu à l’univers souvent très loufoque, voire irrationnel, de l’excès de zèle de la politique nationaliste Québécoise – souvent qui se voit propager de manière endémique, aveuglée (volontairement aveulgée dois-je avouer) et structurelle dans les parages de ceux qui tirent les ficelles dans certains secteurs médiatiques.  Bien sur, le nationalisme pourrait être une force positive.  Mais lorsqu’on franchit une certaine ligne, c’est là où on rencontre des problèmes, car il devient une force aveulgante, floue est basée sur l’irrationalisme – voire autodestructeur.

Moi aussi, je suis nationaliste sur plusieurs fronts (envers toutes les réussites extraordinaires du Canada dans son ensemble, et envers le Québec, ses accomplissements et mes préoccupations et fierté envers sa population).  Mais je crois savoir où devraient être les limites de mon nationalisme.  Et je sais qu’il faut faire entrer des points de vue différents, et de laisser la chance aux autres pourqu’ils puissent réfléchir sur le spectre complet des idées — car personne, absolument personne, n’a le monopole sur les idées.

En tout cas, revenant au sujet du mouvement énorme de l’immersion française et du silence total de la part des médias québécois… Un tel silence n’est pas sans risque.

Il existe bien sur le risque évident que les Québécois seraient privés d’un morceau important du casse-tête lorsqu’ils continuent à former leurs opinions au sujet du Canada anglais et des anglophones ailleurs au pays (malgré tout, on a des partis politiques au Québec – le PQ, le BQ, le QS, l’ON – dont leur but principal est d’influencer ce que les Québécois pensent du reste du Canada, et de s’assurer que les québécois ne tissent jamais de liens émotifs avec le Canada anglophone).  Les sentiments sont importants au moment du scrutin, et il n’est pas dans l’intérêt de ces quatre partis de discuter de ce sujet.  Ça va de soi.

Mais ce mur de silence court un autre risque – un effet secondaire si vous voulez.   Que ce soit au Yukon, en Terre-Neuve, au Manitoba, ou en Nouvelle-Écosse, on a deux million de parents anglophones qui ont décidé, expressément, que leurs enfants (un million d’enfants) allaient “vivre” en français, à l’école – sept heures par jour, cinq jour par semaine, année après année – afin qu’ils sortent avec un sentiment de dualité culturelle et linguistique.  Quant à une telle décision, on n’est plus dans le domaine des “discussions abstraits” des rondes constitutionnels tenues dans des coulisses d’une terre lointaine par des hommes et des femmes dont on ne connaît pas leurs noms – et qui ne touchent guère la vie quotidienne du citoyen ordinaire.  Là, ce que j’entends dire c’est que ces trois millions d’anglophones font des gestes qui affectent, et qui changent leurs vies.  Songez pour un instant à ce que cela veut dire.

Une pleine et ouverte participation de la part des anglophones dans le fait français du Canada – notre fait français – n’est pas à prendre pour acquis.  Il faut impliquer ces anglophones directement dans le dialogue et dans nos vies.  Il faut les reconnaître.  Ils nos partenaires, nos alliés, nos compatriotes – nos ponts.  Et ils sont de plus en plus nombreux.

Les médias au Québec sont en train de nier purement et simplement leur existence.

Mais au fond, ce sont des gens ordinaires, et des êtres humains (des bouchers, des gestionnaires, des cadres, des agriculteurs, des soudeurs, des courtiers d’assurance – la liste est sans fin).  Mais puisqu’ils sont des êtres humains, cette sacrifice qu’ils font est grande (ils changent leur mode de vie malgré tout, et le destin de leurs enfants).

Comme tout être humain, leur patience aura des limites.   Le Québec voulait que les Anglophones du Canada se rangent à ses côtés, et ces gens, dans les millions, ont entendu l’appel du Québec au cours des quelques décennies précédentes.

Ils sont là — maintenant.

De les repousser continuellement, de les nier, et de les écarter du revers de la main (comme s’ils ne valent rien) pourrait être vu à un moment donné, dans leurs yeux, comme l’hypocrisie pure, et comme un affront suite à tout ce qu’ils sont en train de faire et de sacrifier suite à cet appel du Québec.

Je sais très bien que ce qu’ils font est un sacrifice – car je me compte parmi eux.  C’est carrément un genre d’exercice de “francisation des anglos” volontaire, suite à une décision des parents d’inscrire leurs enfants en immersion dès l’enfance.  Au Québec on sait très bien c’est quoi le fardeau qui accompagne toute décision de se “conformer” à une autre langue et culture.  C’est lourd, et ce n’est pas facile.  Mais ces anglophones sont en train de le faire – dans leur propre milieu majoritaire, pour dire le moindre (un défi encore plus grand).

Mais encore, leur patience n’est pas sans limites.  Heureusement, ils ne sont pas encore rendus au bout du rouleau (et je présume qu’ils n’en y seront pas d’ici 15 ou 20 ans).  Mais un jour peut-être ils y seront rendus.  Soyons honnêtes… Les budgets des gouvernements sont limités, le programme d’immersion coûte une fortune, et à un moment donné, dans un avenir lointain, des gens qui contrôlent les budgets provinciaux pourraient poser la question “Quels étaient les résultats… au Québec?”  Mais comme j’ai dit, on est encore loin, très très loin de ce point-là.

Ces anglophones sont vos partenaires et vos ponts entre le Québec et le Canada anglais.  Et il faut les reconnaitre et les traiter ainsi.  Je sais, et vous savez, qu’ils ne seront jamais invités, défendus ou discutés sur la scène des émissions comme Tout le monde en parle, Bazzo.tv, Deux gars en or, les Francs tireurs, ou même 24/60.  Il n’apparaîtront jamais dans les chroniques du Devoir (à moins qu’ils subissent des critiques, pour aucune autre raison  qu’ils ne parlent avec un accent qui “n’est peut-être pas à l’hauteur”, ou qu’ils fassent des fautes de grammaire car ils ont besoin de rafraîchir un peu leurs compétences linguistiques quelques années après leur graduation).  Ils ne seront jamais mentionnés dans les paroles de chansons de Loco-Locasse, et même s’il y en a parmi eux qui soient les meilleurs chanteurs en français, il ne seront jamais invités à chanter à La Voix (l’émission de…  Julie Snyder”).  Il va sans dire qu’ils ne seront jamais salués lors de la St-Jean-Baptiste au Parc Maisonneuve (je ne rêve jamais en couleur).

Toutefois, ces gens sont tout simplement “du bon monde”, des gens très ordinaires – des hommes et des femmes honnêtes qui travaillent fort comme du monde.   Mais il faut dire aux médias que vous voulez les voir et de les entendre, que vous voulez qu’ils se voient tailler une place dans les articles, les chroniques, les émissions de la radio et de la télé, et qu’ils méritent d’être là à vos côtés – où vous pouvez les voir.  Malgré tout, ils sont là suite à l’appel du Québec.

Chose certaine : Autant que les médias créent leurs “propres” saveur du mois nouvelles (peut-être trop souvent, ose-je le dire), ils sont aussi susceptibles de répondre aux demandes de la société si la pression est là, et si la pression est grande.

Comme société, le Québec doit mettre cette pression sur ses médias, ou à long terme, on risque de perdre ces alliés et ces compatriotes anglophones; ces “ponts” les plus inattendus, mais les plus dévoués – et en grand nombre.

Fin de mes commentaires “accrus”

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Un autre argument que j’entends de temps-en-temps du camp souverainiste (mais pas autant qu’avant), c’est que le français hors Québec s’est vu relégué au second plan, au même niveau des langues d’immigrants.  Ce qu’ils prétendent dire, c’est que le français, par biais du multiculturalisme, se voit traité comme toute autre langue au Canada anglais – tel le chinois, l’hindi, l’espagnol, l’arabe, pour n’en nommer que quelques-unes (je vous suggère de lire mon billet sur le multiculturalisme – cliquer sur le lien dans la phrase précédente).

Mais là encore, les faits sur le terrain et tout ce qui se passe démontrent le contraire.  Cet argument révolu essaie de déformer le sens du multiculturalisme afin de marquer des points politiques.  Si cet argument restait en partie viable, il n’y aurait pas de programme d’immersion, il n’y aurait pas d’écoles francophones, il n’y aurait pas de régions du pays légalement obligées d’accorder des services en français, et tout ce que je viens de décrire serait en déclin.  Pourtant, regardez ce qui est en train de se passer.  C’est n’est plus l’époque de 1995.   Il est tellement encourageant de constater que les choses changent, même sur le plan annuel — et de savoir que ces changements vont continuer d’avoir un impact positif.

“Oui”… il demeure encore plusieurs enjeux politiques Québec-Canada qui n’ont pas encore été résolus.  Mais les enjeux de gouvernance sont toujours compliqués, partout au monde.  Ce sont les sentiments des masses qui sont au-dessus de tout gouvernement.  Les gens ordinaires ainsi que leurs valeurs et gestes valent bien plus que tout processus politique.  Ce sont les intentions, sentiments, et ceux qui parlent du cœur qui importent bien plus que toute querelle et tout défi constitutionnel.

Dans ce même esprit, lorsqu’on entend certains politiciens dire qu’il pourrait y avoir des changements majeurs sans devoir ouvrir de nouveau les rondes constitutionnelles (du moins pour le moment), c’est exactement ce genre de programme dont ils parlent (il ne fallait aucun changement constitutionnel afin d’implanter le système d’immersion française).  Le reste va découller avec le temps (le bon moment au bon endroit).

Il n’y a pas si longtemps, j’ai entendu une souverainiste très respectée et très éminente (une des doyennes de la souveraineté) dire une chose très intéressante.  C’est une personne pour qui j’ai beaucoup de respect (même si nos buts ultimes ne sont pas les mêmes).  En bref, elle a fait le point qu’il ne faut pas mettre tous ses œufs dans le même panier.  C’est-à-dire, si votre bonheur se base sur des enjeux comme la formulation d’un texte écrit sur un morceau de papier blanc (telle la constitution), vous allez alors mener une vie triste, déçue et mécontente – peu importe si vous vivez au sein d’un Canada uni ou d’un Québec indépendant.

Elle postulait qu’il fallait regarder au-delà des chicanes politiques et qu’il fallait trouver du réconfort dans le fait qu’il y aurait toujours une population autour de vous qui serait là en temps de besoin.  Parfois ce soutien pourrait se voir manifester soit en forme de solidarité financière (c’est-à-dire nos impôts sont au profit de tout le monde), soit dans l’appui moral de la population – car on vit dans une société dans laquelle les gens cherchent à faire une différence (nous sommes tous dans le même bateau, et le programme d’immersion démontre clairement qu’on est bien plus de gens qu’on aurait jamais cru possible – et nous ramons tous ensemble).  J’en suis entièrement d’accord avec ses sentiments.  Et moi, je pense bien que ce mouvement massif envers le bilinguisme hors Québec incarne justement des points qu’elle tient à cœur au plus haut point.

Des millions de canadiens hors Québec ont porté cette cause à bout du bras, en solidarité avec le Québec, et en solidarité avec le fait français au Canada.  Le français au Canada ne va nulle part car il fait partie intégrale de l’âme du pays, de notre âme.  Les Anglophones à travers le Canada ont pris fait et cause en grands nombres – et l’immersion française est un outil dont ils se dotent.

À mon humble avis, depuis 1995, quand le Canada a dit qu’il allait changer, les citoyens ordinaires (qui n’ont rien à faire avec les enjeux gouvernementaux) ont joint le geste à la parole.

Et c’est ça ce qui différencie les programmes d’immersion du Canada de ceux des É-U.


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L’organisme “Canadian Parents for French” (Les Parents canadiens pour le français) est un organisme énorme qui regroupe les parents anglophones soucieux et sensibles au fait français du Canada.  Il compte des chapitres dans toutes les provinces anglophones.  Comme organisme, ils travaillent plutôt en coulisse – et il est rare d’entendre parler d’eux (parfois, mais rarement ils se font parler dans les médias anglophones, mais “jamais” dans les médias francophones — jamais — un constat qui me laisse perplexe.  Bienvenue au monde des Deux Solitudes!).  

Malgré qu’il s’agit d’un organisme anglophone, ils coordonnent beaucoup d’aspects de ce mouvement populaire envers la françisation et le bi-culturalisme au Canada anglais.  Ils travaillent de concert avec les commissions scolaires, les gouvernements, et les parents anglophones qui exigent que leurs enfants puissent se faire éduquer en français, partout au Canada anglais (dans les petites villes comme dans les grandes).  

C’est incroyable de constater ce qu’ils on pu accomplir dans une si courte période de temps.  À mon avis, c’est un des moteurs de changement et un des organismes les plus puissants en Amérique du Nord.  Ils sont en train de changer le visage, les moeurs, et l’âme d’un pays dans son entier.  Ce n’est rien de moins qu’une nouvelle révolution à base linguistique, une redéfinition des rapports entre les anglophones du Canada et le fait français du pays et la société francophone du Canada.  

Je leur lève mon chapeau!

Cette vidéo en français est bien mignonne!  Je soupçonne que ces enfants sont dans la première année d’école primaire en immersion — mais ils se débrouillent déjà très bien.  Ça me fait rappeler de mes propres expériences au début des années 1980.

La prochaine vidéo en français est assez intéressante.  Elle provient de la Colombie-Britannique, et elle démontre bien les réussites du programme (tous les jeunes qui parlent dans la vidéo sont maintenant en université, mais sont issus du programme d’immersion en Colombie-Britannique).

Pour que les finissants du programme d’immersion puissent poursuivre leurs études universitaires en français sans devoir quitter la Colombie-Britannique, l’Université Simon-Fraser (à Vancouver) a converti une partie de ses programmes universitaires en français (en effet, c’est une continuation du programme d’immersion, mais au niveau universitaire — ce qui fait que Simon Fraser est maintenant une université en partie bilingue – d’où se tient cette conférence que vous voyez dans la vidéo).

Le programme a déjà duré assez longtemps qu’il existe un assez grand nombre de Canadiens anglophones qui sont issus du programme, qui sont maintenant dans la trentaine, et qui sont bien intégré dans le marché du travail.  

Au cours des prochaines années, les ressortissants de la toute première “vague” d’immersion (aussi modeste quelle soit) va accéder à la quarantaine — l’âge à laquelle on commencer à laisser sa marque sur la société.

Cette vidéo explique ce qui arrive aux étudiants de 12 et 13 ans qui s’inscrivent pour la première fois dans le programme, et qui n’ont pas eu la chance de s’inscrire à l’âge de 3, 4, 6 ou de 7 ans.  Cette vidéo explique le programme spécial de “rattrapage” pour les étudiants plus agés.

1ière PARTIE

2ième PARTIE

D’autres vidéos:  

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